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Orié Inoué | Texts | orieinoue.com

 

 

 

 

Orié Inoué & Mitsuru Tateishi : Mukei no fūkei

« On ne regarde avec passion esthétique que les paysages qu'on a d'abord vus en rêve, » écrit Gaston Bachelard dans son essai philosophique 'L'eau et les Rêves', en 1942. Comme s'il y avait une primauté de l'expérience intérieure sur le fait réel, du sensible sur le rationnel. Une force imaginante en mouvement.

Quand on sonde les témoignages artistiques les plus archaïques, on devine combien la capacité humaine à former des images et des fictions issues de notre perception joue un rôle de premier plan dans notre rapport au monde. L'homme est le seul être à pouvoir se figurer des choses qui n'existent pas, à tisser et transmettre des mythes communs. De la même manière, les artistes, en partageant leurs visions subjectives sous la forme d'œuvres, dévoilent des facettes du visible qui restaient jusqu'alors hors de notre propre portée.

Ce dialogue universel, ce poème sans mots, constitue le cœur de l'exposition des artistes japonais Orié Inoué et Mitsuru Tateishi, invités pour la première fois à montrer leurs travaux ensemble à la Galerie Da-End. Exprimant de manière onirique l'interrogation de l'homme face aux mystères qui nous entourent, les deux artistes convient le spectateur à un voyage vers l'autre rive, là où le quotidien s'étiole, où le songe est possible.

Sur la surface ondoyante de volutes des tableaux de Mitsuru Tateishi (1962-) se dessinent les contours d'un rêve. Ses créations témoignent de la capacité des œuvres à interpeller la sensibilité du regardeur et susciter la contemplation. Les tâches abstraites coulées sur toile ou papier évoquent une matière qui foisonne avec langueur. S'inspirant du concept physique de mécanique des fluides, Tateishi joue sur les réactions entre les différents médiums, couleurs et essences mélangés. Couches après couches, il explore les effets de la densité, use de nouveaux outils pour provoquer la turbulence, chercher l'instabilité. Il en résulte des œuvres au fort pouvoir d'évocation, entre phénomènes géologiques et métaphores du règne végétal.

On décèle dans le travail de la plasticienne Orié Inoué (1983-) une similaire dynamique du mouvement. Cette dernière compose en effet des dessins et sculptures faits de boucles, vortex et autres formes circulaires à partir d'éléments naturels : plantules, crins, écorces. Symbole de l'espoir de germination de mondes à venir, la graine matérialise le point de départ à partir duquel l'artiste trace ses arborescences minimalistes. Dans un même périmètre, elle réunit le microcosme de l'échelle cellulaire au macrocosme des paysages stellaires. Son travail semble ainsi habité par l'intuition de liens profonds et insaisissables qui structureraient la nature.

En nous présentant tous deux ces scènes mystérieuses à la beauté méditative, Mitsuru Tateishi et Orié Inoué baignent notre oeil dans une atmosphère de calme et d'émerveillement, comme face aux phénomènes de la nature.

© Fanny Giniès – Galerie Da-End
Texte de la présentation pour l'exposition en duo « Orié Inoué & Mitsuru Tateishi : Mukei no fūkei, 2019

 

 

 

 

 

Orié Inoué & Mitsuru Tateishi à la galerie Da-End

(...) La plasticienne Orié Inoué travaille en effet sur la fragilité, mais aussi la poésie de notre monde, à travers des sculptures aux matériaux naturels et délicats, comme des graines, tentant de mettre en forme ce que l’on pourrait qualifier d’invisible et d’impalpable. Une tentative de révéler au grand jour toutes les facettes du monde et de les laisser s’explorer par notre univers intérieur.

© Art Critique
Extrait de l'article de Art Critique « Orié Inoué & Mitsuru Tateishi à la galerie Da-End », janvier 2019

 

 

 

 

 

Orié Inoué : Germes

L'art d'Orié Inoué interroge ce monde. Sa vérité. Il fouille son sens par nos sens. Il sonde son essence, questionne notre rôle sur cette terre et prenant acte des influences que nous exerçons sur les écosystèmes, interpelle notre lien physique au réel, sa force et sa fragilité. Explorations subtiles d'une relation pure à l'environnement, ses créations évoquent les phénomènes naturels et surnaturels et révèlent les sensibles secrets de l'univers, microbes, planètes, galaxies, cellules, ondes… Telle Vénus caressant l'herbe de ses pieds nus, nous voici transportés par un fil ténu dans le genius loci, impalpable et intime, dans l'atmosphère particulière d'espaces sauvages et inventés, d'un macrocosme poétisé, de créatures imaginées, de microcosmes matérialisés.

Nous voici tour à tour goutte de rosée, pluie de pétales, mousse, étoile, atome, cime d'une vénérable montagne, feuille sur la branche d'un arbre, oiseau, fourmi, toile d'araignée, papier ancien taché de mille mots par la main du philosophe, encre à demi effacée. Nous voici chant d'oiseau ou rugissement des vagues. Nous voici chair et marbre et fleur : « J'utilise le plus souvent des matériaux naturels dérisoires mais pourtant dignes d'intérêt tels que des graines, menues et délicates mais néanmoins sources de vies potentielles et symboles de la perpétuation du monde vivant, explique l'artiste, qui ajoute : « En créant entre autres des illusions évoquant le mimétisme animal, les trompe-l'œil, la paréidolie ou encore les hallucinations, je tente de mettre en forme « l'invisible » et de le faire voir et ressentir afin de nous faire mieux réfléchir sur notre réalité. » Parenthèses enchantées, harmonie des langages évanescents des êtres et des choses, des murmures de la vie devenus presque inaudibles tant il sont assourdis par le bruit troublant des modifications climatiques et des nouvelles technologies de l'anthropocène, les œuvres d'Orié Inoué nous éveillent à la perspective symbolique d'un idéal que l'on n'attend pas, que l'on n'espère plus… Et l'artiste de préciser : « À travers le prisme de l'imaginaire, j'aspire à ce que la mise en valeur de ces facettes du monde puisse nous permettre de recouvrer une perception primitive nous ouvrant l'accès à notre univers intérieur, et de nous reconnecter ainsi à la nature et au vivant. » Une brise d'amour dans la nuit a passée…

© Pascale Geoffrois
Texte de la présentation pour l'exposition personnelle « Germes », 2018

 

 

 

 

 

Les Tsukumogami d'Orié Inoué

Les Tsukumogami, venus de la culture japonaise shintoïste, sont des objets vieux de cent ans qui, vexés d'avoir été laissés à l'état d'abandon, se mettent soudain à vivre sous la forme de monstres. Conservant partiellement leur apparence d'origine (ombrelle, sandale, lanterne), ils arborent pattes, yeux et autres attributs pour venir jouer de mauvais tours aux vivants. Les œuvres d'Orié Inoué sont comme ces objets dotés de pouvoirs insoupçonnés : des œuvres animées.

Non seulement parce que l'artiste, dans sa nouvelle série de travaux, prend les Tsukumogami pour sources d'inspiration, mais aussi parce que tout son travail est traversé par le désir de recueillir, d'amplifier et de transformer les trésors de vitalité présents dans les infimes manifestations de la vie.

Dans le cas présent, l'artiste récupère d'anciennes partitions. Si l'on prête attention aux titres, on s'aperçoit qu'il s'agit de morceaux désuets, des romances jadis destinées aux jeunes filles, le genre de partitions qui s'entassent au fond des vieilles armoires : La Jeune montagnarde, Belle pour lui, Jeune fille à quinze ans.

Orié Inoué soumet ces partitions à un processus de transformation. Elle en gratte partiellement la portée et les notes, accentuant ainsi l'usure naturelle des feuillets. Elle permet alors à de nouvelles formes de prendre vie. Redessinées à l'aide de fils de coton, les portées suivent d'étranges sinuosités : elles dégringolent, miment le vol d'une mouche, zigzaguent d'une note à l'autre. Des graines (qui sont, pour l'artiste, une matière première de prédilection) s'installent à la place des notes, surgissant comme des bulles à la surface du papier. Avec leur couleur charbonneuse, elles évoquent les boules de suie facétieuses du Voyage de Chihiro.

Sautillants et joueurs, fils et graines rendent la partition inutilisable mais lui donnent un sens neuf dans notre monde d'aujourd'hui, que caractérise le décloisonnement entre les disciplines et le mélange des cultures. Car, si le travail d'Orié Inoué est imprégné de Shintoïsme, il l'est aussi de culture Pop, d'humour, de décalage, d'apparente spontanéité. Attention, soin, jeu, esprit de liberté, fantaisie : tels sont les termes avec lesquels il se définit le travail.

La minutie avec laquelle ces oeuvres sont réalisées, leur discrétion ne doivent pas minimiser l'impact qu'elles ont sur nous ou, plutôt, l'espace qu'elles ouvrent en nous — comme le ferait une musique. Elles nous invitent à porter notre regard sur les fils invisibles qui relient les choses entre elles, à tendre l'oreille vers les bruits insaisissables, à toucher l'imperceptible. C'est dans ces zones infimes, en effet, que les objets inanimés prennent vie.

© Anne Malherbe
Article dans Occhiata Studio « Rencontre avec une oeuvre », juin 2018

 

 

 

 

 

Orié Inoué : Bruissements alentour

Les œuvres d'Orié Inoué sont une rêverie. Elles sont tout à la fois dessins et herbiers, plantes et insectes, bestiaire de conte surréaliste et panthéon mythique aux divinités délicates...

L'artiste livre une vision pure d'esthète à la sensibilité exacerbée par un goût raffiné de l'observation et une approche de l'univers emplie d'un respect aiguisé, quasi animiste. Echo poétique assumé de la culture Shinto -qui admet qu'une âme est contenue dans chaque élément ou phénomène de la nature, du plus humble au plus brutal- ici, chaque parcelle de vie est sacrée. Au Japon, les esprits sont myriade et logent partout, dans les arbres, dans les plantes ou dans les pierres et dans les plus simples objets naturels, pétales, graines ou brindilles, écorces ou feuilles... Ce sont ces substances, dont s'empare Orié, avec lesquelles elle compose, en finesse, des œuvres où par la force d'un phénomène psychique lié à l'interprétation que nous en ferons, le végétal se révèle symboliquement incarné. De petits êtres vivent ici. Ces créatures, espiègles ou bienveillantes, personnages fabuleux, figurent dans leurs plus infimes détails la force manifestée de cette nature énigmatique qui peut se montrer parfois, redoutable. C'est sur ces détails justement, que l'artiste nous invite à méditer. Car c'est en eux, naturellement, qu'éclosent les enchantements...

© Pascale Geoffrois
Texte de la présentation pour l'exposition personnelle « Bruissements alentour », 2017

 

 

 

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